dimanche 14 avril 2019

RAPPORT GARDECHE 2018

         La Cordée a toujours publié toutes ses activités dans sa revue Le Gratton depuis  près de 50 ans. Dès 1982, j'ai suivi cette pratique en publiant tant mes activités concernant nos visites souterraines, que mes expériences en désobstruction avec les cartouches de scellement depuis 1996 (rapport Gratton n° 141 de 1999) et avec les pailles (rapport Gratton n° 179 de 2009). Il est vrai qu'après la technique archaïque du marteau - burin, ces nouvelles techniques nécessitaient un échange d'expériences avec les spéléos pratiquant la désobstruction.
Concernant les visites de cavités, j'ai pris depuis longtemps l'habitude de ne plus donner les informations sur l'accès ou le lieu, afin de protéger celles ci d'une fréquentation de masse.
Tant que nous publiions sur un support papier, la diffusion se faisait entre clubs spéléos sensés et respectueux. Depuis le "blog", la moindre information peut être lue partout dans le monde, dans la minute qui suit sa publication et par n'importe qui et donc sans contrôle.
Des agissements intolérables intervenus en 2017 sur une belle cavité du Gard, m'ont amené à encore plus de prudence.
C'est ainsi que depuis deux ans, je commence (comme pour les chiens) à ne donner qu'un seul nom par année à tous les trous que je trouve. Ainsi en 2017, c'était "Borne" : soit B1, B2, B3.....etc (pour info: il n'y a pas de borne à côté de ces trous). En 2018, c'était "Charbonnière": soit C1, C2, ....etc (il n'y a pas plus de charbonnière). Je peux ainsi parler sans risque à quiconque de mes trous. Libre à lui s'il veut chercher autour des bornes et autres noms toponymiques, avec en plus le risque de mélanger les infos entre les différents "B"...., "C"...
Pour 2019, ce sera "D" comme "Dolmen". Pour l'instant, je suis à D0 ! faute de découverte et de temps à consacrer à la prospection...

"Réseau Bernard Magos" (Photo Serge Caillaut)

L'année 2018 a été très riche, trop riche par les travaux engagés avec Guido Goossens et Nicolas Richardeau sur une cavité française majeure: le "Réseau Bernard Magos" (pour la communauté spéléo), appelé: "Grotte de Barjac" (pour le grand public).
Cette cavité m'a "mangé",comme pour mes deux collègues, beaucoup de temps (plus de 60 visites sur le site en un semestre, soit 2 à 3 fois par semaine, avec à chaque fois 2 combis, 2 paires de chausses et 2 à 3 paires de gants suivant les activités). Temps consacré certes à l'exploration (encore en cours actuellement), mais d'abord à sa sauvegarde et sa protection, à la topographie, à la mise en oeuvre de l'information par de nombreuses séances photos et film par des pros de l'image souterraine, ainsi qu'une forme d'inventaire du concrétionnement par plusieurs milliers de photos de repérage pour le photographe et le cinéaste professionnel, mais aussi en vue d'étude ultérieure par de véritables scientifiques.
Je ne rentrerai pas dans les détails de ces séances effectuées avec mes collègues, vous les trouverez en partie dans la revue "Spéléo Mag".

Nous ne sommes pas là pour satisfaire notre "ego" d'inventeurs mais pour sauvegarder cette cavité, qui si elle n'avait pas été ouverte et déclarée, aurait été à très brève échéance  en grande partie involontairement détruite.
Un livre étant en préparation pour sa sortie avant la fin de ce premier semestre, je préfère vous laisser découvrir des photos de qualité avec celui ci quand il sera publié.
Juste en fin de rapport, une sélection très réduite de sept photos.
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En fin d'année 2017, en prospectant près d'un aven où l'on travaillait avec Jean Bernard, je trouve deux petits trous centimètriques et insignifiants que j'entrouvre légèrement. Puis une autre fois dans le même secteur un trou impénétrable de plusieurs mètres de profondeur dans un lapiaz. J'indique ce dernier à J.B. mais lui indique par erreur, l'accès aux deux premiers... Il tombe sur l'un des deux que j'avais honnêtement complètement oublié bien que je l'avais nommé B15, et il l'agrandit un peu plus.
Ayant abandonné pour quelques temps, faute de bras, l'aven précédent, J.B. s'attaque seul à la désobstruction de ce trou. Je lui donnerai, faute de temps, qu'un seul coup de main au mois de mai. Heureusement Philippe l'aidera lors de sa venue dans le Gard. En fin d'année, il était à - 8 mètres, après avoir remonté une quantité de seaux d'argile et de pierres.
L' entrée
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Le B2. Trouvé en 2017 (voir Rapport Gardèche 2017) s'est lui aussi trouvé délaissé: seulement 6 visites en 2018 !
Visites consacrées: - à l'élargissement de la fenêtre en bas du P3 et donnant accès dans le plafond de la diaclase de 6m,
          
                            Mise en protection de la diaclase concrétionnée du dessous lors de 
                                                    l'élargissement de la fenêtre d'accès.
( Planche, Mousse, plastique).
La fenêtre élargie. (Cela reste étroit, vous me connaissez...).

                               - à l'évacuation des gravats accumulés à force de pailles et leur remontée pénible de -14 à l'extérieur en passant dans cet étroit et gras P3, afin de garder une cavité présentable dans la suite. (Pousser au dessus de soi 2 petits kits sur bloqueurs remplis de gravats, il faut être maso !)
Petite idée du P3 en cours d'élargissement aux pailles (Genou à droite).

En fin d'année la diaclase était accessible sans en avoir détruit ses concrétions.
Que va me révéler en 2019 le fond de celle ci ? Toujours aussi gras et étroit ???
Une première descente en janvier me réserve de l'intéressant; à suivre.
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Entre mes visites au Réseau Bernard Magos, je me défoule au grand air en bartassant.
Cela me permets de porter à 13 le nombre de départs trouvés .
Parmi ceux ci, deux me semblaient plus intéressants, de même type et sur lesquels je me suis activé.
Le C6: petits puits d'entrée de moins de deux mètres à agrandir, suivi d'un étroit boyau donnant après quelques mètres par une fenêtre en paroi haute d'une salle pentue. Hélas, le fond semble bien colmaté.
A revoir en période de "vaches maigres".
Entrée du boyau.
Etroiture dans le boyau avant accès au ressaut sur la salle.
Coulée massive dans la salle à -5m
Plafond dans la salle
Accès au fond de la salle.

Le C11 (toujours pas de charbonnière 😊) Petit puits d'accès idem au C6 et boyau étroit faisant suite.
Hélas si je sais me glisser dans le puits, impossibilité de se casser pour pénétrer dans le boyau. Pour le bien, il faudrait vider le puits d'accès ce qui est impossible vu l'étroitesse de celui ci. Il me reste à ouvrir le haut de l'accès au boyau. Quelques pailles après, je peux m'introduire dans celui ci. Petite pente et élargissement formant mini salle. Sur la droite le conduit plonge vers un puits qui semble profond.
         
                   Guido au départ du puits .                                          Le puits.
Quelques semaines plus tard, j'y retourne enfin pour le montrer à Guido et Nicolas. Ils y descendent (corde de 30) sans moi (je n'avais pas pris mon matos perso!). Surprise, au fond ils trouvent des traces anciennes de désob? Le puits d'entrée se serait il peu à peu rempli avec les années et interdisant le passage dans le boyau ?
Ils me signalent au fond, une remontée très grasse avec une étroiture qu'ils ne sont pas tentés de passer. Y aurait il une seconde entrée ?
Ce n'est que tout début 2019 que j'y vais faire un saut. Le fond est effectivement très gras. Une suite plongeante verticale étroite (type faille) est envisageable. Légère présence de Co2 (crainte pour les mois qui viennent d'une remontée du taux de Co2).
Je passe l'étroiture dans la remontée grasse. Derrière la zone est propre, sans argile; mais je tombe sur une seconde étroiture très, très sévère. Seul dans ce trou, je ne trouve pas raisonnable de la passer. C'était bon quand j'avais 30 ans de moins ! Je reviendrai.
Petits détails dans la zone propre après l'étroiture.
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Grotte de Barjac
(Réseau Bernard Magos)

 Les cinq premières photos ont été réalisées avec un téléphone portable lors de la découverte. Les deux dernières avec un appareil photo simple. Elles n'ont donc aucune prétention.
A tout seigneur tout honneur: notre ami Bernard Magos lors de sa visite.
Triangle. Il y a plusieurs groupes dans le réseau.
Bassin aux coupelles. La plus grande mesure plus de 30cm.
Un gour parmi les dizaines de gours.
Fistuleuse carrées soudées au sol. Il y en a à plusieurs endroits.
Quelques sapins en bord de gour. Il y en a des centaines.
Gour plus classique.

Reste à découvrir dans le livre (à sortir d'ici quelques mois) la multitude d' excentriques, disques, draperies, papillons, fleurs... 
Un univers unique, fragile et extrêmement dense de concrétions entre lesquelles il faut cheminer avec la plus grande précaution vu leur proximité immédiate et permanente des visiteurs.
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Un grand merci aux équipes extérieures qui nous ont apporté leurs connaissances, leur aide et leur temps pour topo, photos et film en vue de partager cette merveille dans un souci de protection.

Le Gardèchti.